Un groupe de jeunes agneaux

Promesses non tenues, système défaillant

Pourquoi 140 millions d’agneaux ont-ils dû souffrir pendant que l’industrie de la laine stagnait?

17.10.2024

En 2004, les leaders de l’industrie lainière australienne ont fait une promesse ambitieuse au monde entier: celle d’éradiquer progressivement la pratique cruelle de la mutilation des agneaux vivants (ou, comme ils l’appellent, le «mulesing») d’ici à 2010. Ce fut un grand moment, déclenché par la pression internationale et la menace de boycott de la laine australienne par les détaillants en réponse à la condamnation mondiale de la brutalité de la mutilation des agneaux vivants.

Mais la promesse a été rompue aussi facilement qu’elle a été faite.

En 2009, alors que la date limite approchait, les leaders de l’industrie lainière australienne ont rompu leur promesse. Il est difficile de ne pas se demander s’ils ont vraiment eu l’intention de mettre fin à la mutilation des agneaux vivants, ou s’il s’agissait simplement d’un stratagème pour faire diversion...

S’ils avaient tenu leur engagement, on estime que 140 millions d’agneaux auraient pu être épargnés de la douleur atroce et des traumatismes causés par cette méthode brutale. La quantité de peau prélevée sur les agneaux au cours des 20 dernières années pourrait remplir trois piscines olympiques ou couvrir 195 terrains de football.

Que s’est-il donc passé? Et pourquoi l’Australie reste-t-elle le seul pays à s’accrocher à cette pratique dépassée et cruelle?

La mutilation d’agneaux vivants est un problème global qui s’explique par la demande mondiale de laine. À l’heure actuelle, 80% de la fine laine mérinos utilisée dans l’habillement au niveau mondial provient d’Australie, le seul pays où l’on pratique la mutilation d’agneaux vivants. Cela signifie que la majorité des vêtements en laine, que l’on trouve partout, de l’armoire de vos amis aux magasins de tous les pays, proviennent probablement de moutons soumis à cette pratique cruelle. Ne vous y trompez pas, il s’agit d’un problème mondial.

Mutilation d’agneaux vivants: une solution cruelle à un problème que nous avons créé

Si vous ne connaissez pas encore le sujet, sachez que la mutilation des agneaux vivants est une méthode brutale et douloureuse qui consiste à immobiliser sur le dos des agneaux âgés d’à peine deux semaines dans un cadre métallique et à découper de larges plis de peau autour de leur arrière-train afin de réduire le risque de prolifération de mouches. Ces pauvres agneaux n’ont que quelques semaines, ils sont sans défense et terrifiés. La douleur qu’ils ressentent est à la fois immédiate et persistante.

Si la myase - lorsque les mouches pondent leurs œufs dans les plis de la peau des moutons - est un grave problème de bien-être, la mutilation des agneaux vivants n’est pas la bonne solution. Il s’agit d’une tentative grossière de résoudre un problème que nous avons créé en élevant délibérément des moutons pour qu’ils aient plus de peau (et donc plus de plis cutanés) dans le but d’obtenir encore plus de laine.

Seulement voilà: le fait de couper la peau autour de l’arrière-train ne résout pas entièrement le problème. Ces pauvres agneaux peuvent encore souffrir de la maladie sur d’autres parties de leur corps, partout où leur peau présente des plis. Ce qui est encore plus choquant, c’est que l’industrie de la laine connaît depuis plus de 100 ans le lien entre l’élevage de moutons ridés et la myase.1

Il ne s’agit pas d’un problème mineur.

On estime que plus de 10 millions d’agneaux subissent chaque année la douleur et le traumatisme de la mutilation à vif, soit environ 19 agneaux par minute.2

Les anti-douleurs choisis par l’industrie de la laine ne sont pas autorisés pour vos animaux de compagnie, en revanche, ils semblent être bons pour les agneaux

Imaginez que vous emmeniez votre chien chez le vétérinaire pour un examen régulier et que l’on vous dise qu’il faut lui enlever de la peau de l’arrière-train, sur une largeur faisant la taille de la paume de votre main. Le vétérinaire applique une crème topique après les coupes pour soulager brièvement la douleur. Pourtant, votre chien en subira les effets pendant des jours, voire des semaines.

Imaginez maintenant que la personne qui réalise cette «procédure chirurgicale» n’est même pas vétérinaire.

Tout cela serait illégal pour un chien.

Quant au soi-disant soulagement de la douleur, il ne suffit pas.

Seuls deux États australiens ont rendu obligatoire le soulagement de la douleur: l’État du Victoria et l’État de Tasmanie. Cela n’inclut pas l’utilisation obligatoire d’un traitement adéquat de la douleur et des plaies. Les agneaux sentent chaque coupure et ce n’est qu’après la mutilation qu’une crème topique soulageant brièvement la douleur est appliquée. Pour en savoir plus sur la mutilation des agneaux vivants et l’utilisation d’analgésiques, cliquez ici.

La solution ignorée

La seule vraie solution? Élever des moutons à «corps doux» qui sont naturellement résistants à la prolifération des mouches. Cela signifie essentiellement qu’il ne faut plus délibérément élever des moutons ayant un excès de peau et des plis cutanés qui attirent les mouches (et leur causent également d’autres problèmes majeurs de bien-être), mais qu’il faut rejoindre les milliers de producteurs de laine qui élèvent des moutons qui n’ont pas besoin d’être mutilés vivants.

Près de la moitié des producteurs de laine australiens ont reconnu que la mutilation des agneaux vivants était brutale et que le marché mondial de la laine ne la soutenait pas; nombre d’entre eux sont passés à l’élevage de races résistantes à la mouche du mouton. Non seulement ces producteurs améliorent le bien-être des animaux, mais ils en récoltent également les fruits: des moutons en meilleure santé, des coûts moins élevés et des prix plus élevés pour leur laine.

Qui plus est, ils ont effectué cette transition seuls, sans le soutien de l’industrie lainière australienne qui continue à mettre en doute l’utilisation de la bonne génétique comme solution.

Cette solution n’est pas nouvelle, l’industrie de la laine la connaît depuis des décennies et des milliers de producteurs de laine l’ont mise en œuvre avec succès depuis les années 1990.

L’échec du leadership: quand les promesses n’ont aucune valeur

L’industrie de la laine a échoué de manière catastrophique à mener une politique nationale d’élimination progressive de la mutilation des agneaux vivants. Au lieu de soutenir les producteurs dans leur transition, des millions ont été dépensés pour des solutions alternatives telles que des vaccins et des traitements chimiques - qui ne s’attaquent pas à la cause première. Entre 2018 et 2023, l’Australian Wool Innovation (AWI) a gaspillé des millions pour tenter de mettre au point un vaccin contre la myase.

Mais pourquoi? Il s’avère que les personnes qui influencent les décisions sont souvent les mêmes que celles qui profitent de la poursuite de la pratique. Cela peut s’expliquer par le fait que ces organismes haut placés sont dirigés par des producteurs qui pratiquent encore eux-mêmes la mutilation d’agneaux vivants ou qui exploitent des élevages qui vendent des moutons présentant un taux de plis élevé et donc exposés au risque de la myase (voir le rapport aux pages 39-43).

Il s’agit là d’un conflit d’intérêts.

Ce n’est pas seulement tragique pour les agneaux, c’est aussi mauvais pour les affaires.

Les agneaux ne sont pas les seuls à avoir été trahis. Les producteurs de laine, le public australien, les consommateurs, les organisations de protection des animaux et les marques mondiales attendaient tous de l’industrie qu’elle tienne la promesse qu’elle avait faite en 2004.

Au lieu de cela, nous avons été abreuvés pendant 20 ans de paroles creuses et d’excuses.

Plus de 330 marques internationales se sont publiquement opposées à la mutilation d’agneaux vivants et 90 d’entre elles ont signé la Déclaration d’intention préparée par QUATRE PATTES, appelant l’industrie lainière australienne à mettre un terme à cette pratique d’ici à 2030.

Nike, adidas, H&M, Zara, Target, Patagonia, Hugo Boss, Kmart et The North Face se sont tous engagés à ne s’approvisionner qu’en laine certifiée exempte de mutilation d’agneaux vivants.

Les marques ne sont pas les seules à exprimer leur mécontentement. Un sondage d’opinion YouGov réalisé en avril 2024 a montré que près de quatre personnes sur cinq sont favorables à ce que les détaillants cessent de s’approvisionner en laine provenant de moutons soumis à la mutilation à vif une fois qu’ils ont été informés de la procédure.3

Nous ne pouvons pas permettre que les agneaux souffrent encore pendant 20 ans jusqu’à ce que l’industrie lainière australienne tienne ses promesses.

Il faut que les marques et les détaillants du monde entier bannissent de leurs créations la laine provenant d’agneaux mutilés vivants et demandent à l’industrie lainière australienne et aux gouvernements de légiférer en vue d’une élimination progressive.

La solution que nous soutenons et préconisons - l’élevage de moutons à corps doux - est soutenue par les organisations de protection des animaux, la science et des milliers de producteurs de laine. Pour en savoir plus, consultez le nouveau rapport:

La promesse rompue:

La promesse rompue:

L’incapacité de l’industrie lainière australienne à mettre un terme à la mutilation des agneaux vivants (mulesing) et les raisons pour lesquelles les gouvernements doivent intervenir.

Lamm auf einem Feld

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en savoir plus

Source

1. Belschner HG, Carter HB. Fleece Characteristics of Stud Merino Sheep, in Relation to the Degree of Wrinkliness of the Skin of the Breech. I. Australian Veterinary Journal. 1936;12(2):43–54. https://doi.org/10.1111/j.1751-0813.1936.tb00003.x
2. Ipsen M. World’s best practice in Lamb Survival. Nuffield Australia Project No 1316. 2014 Apr:42.
3. YouGov. YouGov Poll Wear It Kind Report 2024. 2024. https://media.4-paws.org/4/8/d/4/48d43b190ae9492c0e198837e11c4813b433e26c/YouGov_Poll_Wear_It_Kind_Report_2024-07-30.pdf

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